👉 Voir tous les cas cliniques

Patiente de 36 ans avec une MICI controlée par Stelara

INTRODUCTION

À l’ère du COVID-19, nous lançons Radio Cochin, des séquences courtes et des messages clairs sur le coronavirus pour nos collègues de ville. 

Je suis Docteur Vincent Mallet, médecin à Cochin, Professeur des Universités de Paris et je m’entretiens avec la Professeure Vered Abitbol, gastroentérologue à Cochin.

Retour d'expérience


Présentation du cas clinique

DR MALLET : Professeure Abitbol, merci de répondre à nos questions. Je suis médecin généraliste à Paris dans le 13e et je suis une patiente de 36 ans avec une Maladie Inflammatoire Chronique de l’Intestin, une MICI, contrôlée par Stelara. 

Elle m’appelle et me dit qu’elle a de la fièvre et des douleurs musculaires, son mari a fait un syndrome respiratoire fébrile la semaine dernière et je ne sais pas quoi faire. 

Que dois-je faire ? Que me conseillez-vous ?

Réponse et discussion

PRE VERED ABITBOL : Merci beaucoup pour cette question. Si je comprends bien : il s’agit d’une patiente atteinte de MICI, traitée par Stelara. Sa MICI est bien contrôlée mais la patiente présente des signes infectieux dus à un probable contage de son mari qui était malade la semaine dernière. Le mari s’est-il fait tester COVID ?

DR MALLET : Je ne l’ai pas testé non.

PRE VERED ABITBOL : Il n’est pas testé. De toute façon, la patiente a de la fièvre donc nous allons la considérer comme infectée. Ma première recommandation est donc d’arrêter le traitement immunosuppresseur, d’arrêter la biothérapie qu’est le Stelara.

Mon deuxième conseil est qu’elle aille se faire tester. Dans ce cas, je lui demande de prendre contact avec vous, médecin généraliste, ou bien je lui envoie une ordonnance pour faire son test COVID. Il est désormais possible de faire ces tests en ville. 

Malgré la sensibilité qui n’est que de 60% pour les tests, il s’agit quand même d’une information importante. Si l’on a une notion de COVID positif, ce sera une donnée importante pour le suivi.

DR MALLET : Quoi qu’il arrive, avant le test, je lui indique d’arrêter Stelara. 

PRE VERED ABITBOL : Voilà, c’est le premier message. Et vous allez vous faire tester si vous pouvez. De toute façon, même si elle a un résultat négatif – parce que l’on sait qu’il y a 40% de faux négatifs – elle doit arrêter au moins 14 jours sa biothérapie. 

Ce qu’il faut lui expliquer également : l’évolution possible, la grande attention qu’il faut avoir, sachant que les aggravations que l’on peut observer apparaissent surtout dans la deuxième semaine. 

Avant de lui parler des aggravations, il faut lui préciser que 9 fois sur 10 cela se passe très bien et qu’elle va guérir sans problème, mais que s’il y a aggravation il faut vraiment se méfier à partir de J7-J10, qui sont des jours un peu délicats où les aggravations respiratoires peuvent être très brutales.

DR MALLET : À votre connaissance, y a-t-il un signal de danger entre Stelara et COVID-19 ?

PRE VERED ABITBOL : Non. Nous avons été très vigilants car nous savions que les patients sous immunosuppresseurs ou biothérapies ont des prédispositions aux infections virales, bactériennes. Nous avons donc placé ces patients immunodéprimés – ou immunodéprimés par leurs médicaments – dans le groupe des patients dits fragiles. 

Ce qui est très étonnant, c’est que jusqu’à présent nous n’avons pas eu de signal particulier chez nos patients atteints de MICI et traités par biothérapie ou immunosuppresseur. Nous avons même l’impression que cela ne se passe pas trop mal pour eux, mais il faut se méfier de nos impressions. 

Nous sommes d’ailleurs tous encouragés à participer aux registres internationaux et à rentrer nos patients MICI traités par immunosuppresseur et atteints de COVID pour voir sur un grand nombre de patients comment ils se comportent vis à vis du virus.

DR MALLET : D’accord. Cette personne a donc de la fièvre depuis deux jours, avec des douleurs musculaires et un syndrome grippal. Je vais donc envoyer son mari se faire tester avec elle. J’ai compris que cela pouvait s’aggraver vers J7-J10 mais je la rassure parce qu’il n’y a pas de signal de danger avec le Stelara, ce qui est plutôt une bonne chose.

Comment je la surveille, que me conseillez-vous ?

PRE VERED ABITBOL : À l’AP-HP nous avons une plateforme de surveillance des patients atteints d’infection COVID à domicile, par télésurveillance. Cette plateforme s’appelle COVIDOM et tous les médecins peuvent obtenir des codes pour rentrer leurs patients sur cette plateforme de surveillance. 

Les patients inscrits sur cette plateforme reçoivent des appels une à deux fois par jour avec des questionnaires standardisés pour suivre leur évolution et pour les conseiller en cas d’aggravation. 

C’est vraiment très bien fait, et maintenant, j’inscris tous mes patients suspects de COVID ou COVID avérés sur COVIDOM.

DR MALLET : D’accord. Même en tant que médecin généraliste dans le 13e j’ai accès à cette plateforme ? Je peux récupérer des codes ? 

PRE VERED ABITBOL : Oui ! Vous pouvez tout à fait demander vos codes qui vous seront envoyés sous 24h. Ensuite, vous rentrez facilement vos patients.

DR MALLET : C’est un message important ! Je peux donc demander mes codes, inscrire mes patients et c’est COVIDOM qui va les surveiller et déclencher l’alerte si jamais quelque chose se passe mal ?

PRE VERED ABITBOL : Exactement. Il y a plus de 40 000 patients inscrits sur COVIDOM aujourd’hui.

DR MALLET : C’est une très très bonne information. Même pour cette patiente, qui je pense n’est pas vraiment à risque, cette plateforme de surveillance est très intéressante.

PRE VERED ABITBOL : Elle va être rassurée ! Nous parlons de malades qui sont confinés et qui en fait sont très inquiets. Donc cela les rassure d’avoir cette surveillance par questionnaires itératifs quotidiens.

Message de fin

DR MALLET : Merci beaucoup Professeure Abitbol pour ce message extrêmement clair. Votre message pour ce cas clinique ?

PRE VERED ABITBOL : Mon message : Les patients atteints de MICI bien contrôlée par leur biothérapie doivent continuer leur traitement. Cependant, s’il y a des signes d’infection, ils doivent contacter leur médecin qui leur fera suspendre les traitements, leur donnera des conseils pour gérer et surveiller leur infection COVID notamment avec la plateforme COVIDOM et puis leur gastroentérologue leur indiquera le moment de reprise de la biothérapie après guérison.

DR MALLET : Merci beaucoup Professeure Abitbol pour ce message extrêmement didactique et clair ! Nous n’hésiterons pas à vous recontacter.

PRE VERED ABITBOL : Avec plaisir !

Retranscription complète
Il n'y a pas encore de retranscription écrite pour cet épisode

À l’ère du COVID-19, nous lançons Radio Cochin, des séquences courtes et des messages clairs sur le Corona Virus pour nos collègues de ville.

Je suis Docteur Vincent Mallet, médecin à Cochin, Professeur des Universités de Paris et je m’entretiens avec la Professeure Vered Abitbol, gastroentérologue à Cochin.

DR MALLET : Professeure Abitbol, merci de répondre à nos questions. Je suis médecin généraliste à Paris dans le 13e et je suis une patiente de 36 ans avec une Maladie Inflammatoire Chronique de l’Intestin, une MICI, contrôlée par Stelara. 

Elle m’appelle et me dit qu’elle a de la fièvre et des douleurs musculaires, son mari a fait un syndrome respiratoire fébrile la semaine dernière et je ne sais pas quoi faire. 

Que dois-je faire ? Que me conseillez-vous ?

PRE VERED ABITBOL : Merci beaucoup pour cette question. Si je comprends bien : il s’agit d’une patiente atteinte de MICI, traitée par Stelara. Sa MICI est bien contrôlée mais la patiente présente des signes infectieux dus à un probable contage de son mari qui était malade la semaine dernière. Le mari s’est-il fait tester COVID ?

DR MALLET : Je ne l’ai pas testé non.

PRE VERED ABITBOL : Il n’est pas testé. De toute façon, la patiente a de la fièvre donc nous allons la considérer comme infectée. Ma première recommandation est donc d’arrêter le traitement immunosuppresseur, d’arrêter la biothérapie qu’est le Stelara.

Mon deuxième conseil est qu’elle aille se faire tester. Dans ce cas, je lui demande de prendre contact avec vous, médecin généraliste, ou bien je lui envoie une ordonnance pour faire son test COVID. Il est désormais possible de faire ces tests en ville. 

Malgré la sensibilité qui n’est que de 60% pour les tests, il s’agit quand même d’une information importante. Si l’on a une notion de COVID positif, ce sera une donnée importante pour le suivi.

DR MALLET : Quoi qu’il arrive, avant le test, je lui indique d’arrêter Stelara. 

PRE VERED ABITBOL : Voilà, c’est le premier message. Et vous allez vous faire tester si vous pouvez. De toute façon, même si elle a un résultat négatif – parce que l’on sait qu’il y a 40% de faux négatifs – elle doit arrêter au moins 14 jours sa biothérapie. 

Ce qu’il faut lui expliquer également : l’évolution possible, la grande attention qu’il faut avoir, sachant que les aggravations que l’on peut observer apparaissent surtout dans la deuxième semaine. 

Avant de lui parler des aggravations, il faut lui préciser que 9 fois sur 10 cela se passe très bien et qu’elle va guérir sans problème, mais que s’il y a aggravation il faut vraiment se méfier à partir de J7-J10, qui sont des jours un peu délicats où les aggravations respiratoires peuvent être très brutales.

DR MALLET : À votre connaissance, y a-t-il un signal de danger entre Stelara et COVID-19 ?

PRE VERED ABITBOL : Non. Nous avons été très vigilants car nous savions que les patients sous immunosuppresseurs ou biothérapies ont des prédispositions aux infections virales, bactériennes. Nous avons donc placé ces patients immunodéprimés – ou immunodéprimés par leurs médicaments – dans le groupe des patients dits fragiles. 

Ce qui est très étonnant, c’est que jusqu’à présent nous n’avons pas eu de signal particulier chez nos patients atteints de MICI et traités par biothérapie ou immunosuppresseur. Nous avons même l’impression que cela ne se passe pas trop mal pour eux, mais il faut se méfier de nos impressions. 

Nous sommes d’ailleurs tous encouragés à participer aux registres internationaux et à rentrer nos patients MICI traités par immunosuppresseur et atteints de COVID pour voir sur un grand nombre de patients comment ils se comportent vis à vis du virus.

DR MALLET : D’accord. Cette personne a donc de la fièvre depuis deux jours, avec des douleurs musculaires et un syndrome grippal. Je vais donc envoyer son mari se faire tester avec elle. J’ai compris que cela pouvait s’aggraver vers J7-J10 mais je la rassure parce qu’il n’y a pas de signal de danger avec le Stelara, ce qui est plutôt une bonne chose.

Comment je la surveille, que me conseillez-vous ?

PRE VERED ABITBOL : À l’AP-HP nous avons une plateforme de surveillance des patients atteints d’infection COVID à domicile, par télésurveillance. Cette plateforme s’appelle COVIDOM et tous les médecins peuvent obtenir des codes pour rentrer leurs patients sur cette plateforme de surveillance. 

Les patients inscrits sur cette plateforme reçoivent des appels une à deux fois par jour avec des questionnaires standardisés pour suivre leur évolution et pour les conseiller en cas d’aggravation. 

C’est vraiment très bien fait, et maintenant, j’inscris tous mes patients suspects de COVID ou COVID avérés sur COVIDOM.

DR MALLET : D’accord. Même en tant que médecin généraliste dans le 13e j’ai accès à cette plateforme ? Je peux récupérer des codes ? 

PRE VERED ABITBOL : Oui ! Vous pouvez tout à fait demander vos codes qui vous seront envoyés sous 24h. Ensuite, vous rentrez facilement vos patients.

DR MALLET : C’est un message important ! Je peux donc demander mes codes, inscrire mes patients et c’est COVIDOM qui va les surveiller et déclencher l’alerte si jamais quelque chose se passe mal ?

PRE VERED ABITBOL : Exactement. Il y a plus de 40 000 patients inscrits sur COVIDOM aujourd’hui.

DR MALLET : C’est une très très bonne information. Même pour cette patiente, qui je pense n’est pas vraiment à risque, cette plateforme de surveillance est très intéressante.

PRE VERED ABITBOL : Elle va être rassurée ! Nous parlons de malades qui sont confinés et qui en fait sont très inquiets. Donc cela les rassure d’avoir cette surveillance par questionnaires itératifs quotidiens.

DR MALLET : Merci beaucoup Professeure Abitbol pour ce message extrêmement clair. Votre message pour ce cas clinique ?

PRE VERED ABITBOL : Mon message : Les patients atteints de MICI bien contrôlée par leur biothérapie doivent continuer leur traitement. Cependant, s’il y a des signes d’infection, ils doivent contacter leur médecin qui leur fera suspendre les traitements, leur donnera des conseils pour gérer et surveiller leur infection COVID notamment avec la plateforme COVIDOM et puis leur gastroentérologue leur indiquera le moment de reprise de la biothérapie après guérison.

DR MALLET : Merci beaucoup Professeure Abitbol pour ce message extrêmement didactique et clair ! Nous n’hésiterons pas à vous recontacter.

PRE VERED ABITBOL : Avec plaisir !

Radio Cochin

Cas cliniques sur le Covid-19

Radio Cochin est une série de cas cliniques audio créés pour les soignants de ville, par des experts de toutes spécialités médicales, pour renforcer la collaboration ville-hôpital face au coronavirus.

Recevez les nouveaux cas en exclusivité

Retrouvez-nous sur votre plateforme