À l’ère du COVID-19, nous lançons Radio Cochin, des séquences courtes et des messages clairs sur le coronavirus pour nos collègues de ville.
Je suis Docteur Vincent Mallet, médecin à Cochin, Professeur des Universités de Paris et je m’entretiens avec le Professeur Paul Legendre, Chef de clinique en Médecine Interne à Cochin.
DR MALLET : Vous êtes responsable des unités COVID et du service de médecine interne de Cochin. Pouvez-vous nous raconter comment vous avez organisé les choses et vécu cette crise sanitaire majeure ?
PR PAUL LEGENDRE : Je suis en poste dans un service de Médecine Interne où nous faisons principalement des maladies auto-immunes et des maladies d’aval d’urgences. Nous avons donc dû adapter notre activité suite à cette crise sans précédent.
Nous avons dû transformer nos secteurs d’hospitalisations en salles dédiées à la prise en charge des patients COVID. Nous avons 3 salles sur 4 qui les accueillent actuellement.
Dans le cadre de l’hôpital de semaine, nous faisions de la programmation qui a été adaptée en salle COVID.
Nos patients viennent donc principalement des urgences et sont amenés à rester dans le service pour une surveillance. L’organisation a été bien faite puisque nous avons des patients qui viennent des urgences et qui sont transférés soit dans une unité de soins continus parce qu’ils s’aggravent en réanimation, soit vers des soins de suites, des hospitalisations conventionnelles ou à domicile parce qu’ils sont stables. Et il s’agit de la majorité de nos patients heureusement.
Nous avons pour l’instant accueilli des patients de tous les âges, principalement des personnes vulnérables avec des comorbidités. La prise en charge de ces malades consiste principalement à une oxygénothérapie, des traitements d’infections et une prise en charge des comorbidités associées.
DR MALLET : Donc en général, suite à quelques jours d’hospitalisation, les gens rentrent chez eux ? Comment cela se passe ?
PR PAUL LEGENDRE : Effectivement. Nous avons plutôt un rôle de plaque tournante car l’hôpital Cochin a décidé de limiter les venues dans notre service. En effet, nous sommes la porte d’entrée vers la réanimation, or comme vous le savez, la réanimation est un secteur en forte période de tension.
Nous accueillons cependant des patients qui nécessitent des soins assez lourds : des oxygénothérapies ou des comorbidités qui nécessitent une hospitalisation. Dès que nous avons l’impression que nous pouvons baisser le besoin en oxygène des patients et améliorer leur état général, ils peuvent rentrer chez eux.
Mais cela est très variable. Certains vont rester 72h dans notre service, gardent un lit d’oxygène et seront sevrés en une semaine dans un autre service. D’autres ne nécessitent pas d’oxygène mais peuvent passer 4 ou 5 jours dans notre service parce qu’ils sont très asthéniques ou dénutris.
La majorité des patients heureusement ne nécessite pas de transfert en réanimation ni en unité de soins continus. Cette majorité va donc pouvoir regagner son domicile à l’issue de cette infection.
DR MALLET : Cela fait désormais plusieurs semaines que vous travaillez ainsi. Quels sont, selon vous, les facteurs de risque de progression vers des formes graves ? Quels sont les patients dont il faut se méfier ?
PR PAUL LEGENDRE : Les patients dont il faut se méfier ne sont pas toujours ceux auxquels nous aurions pensés auparavant.
Nous avons beaucoup de patients immunodéprimés et fragiles qui font certes des formes compliquées, mais qui ont le plus souvent une évolution assez favorable et qui ne font pas forcément une forme pulmonaire grave.
Ceux qui vont faire une forme pulmonaire sévère, hypoxémique, sont plus souvent ceux qui ont un diabète, une hypertension artérielle, un surpoids. Plutôt des hommes entre 50 et 70 ans.
Ce profil de patients est souvent le plus à risque d’une dégradation respiratoire rapide. Le surpoids est donc un facteur de risque, l’obésité également.
DR MALLET : Le surpoids avec un IMC supérieur à 25 ou plutôt à 30 ?
PR PAUL LEGENDRE : A priori le surpoids d’une manière générale, donc plus de 25. L’obésité a l’air d’être un facteur de risque pour réaliser des syndromes de détresses respiratoires aiguës qui vont nécessiter une intubation puisque les patients ont a priori plus de difficulté à ventiler les bases des poumons du fait de l’abdomen coincé.
Nous avons également un profil de patients qui font des formes très asthéniques avec peu de symptômes respiratoires mais en revanche une perte de poids importante, des troubles de l’alimentation, des diarrhées. Il s’agit plutôt des personnes âgées. Cela se résout avec l’apport de nutriments intraveineux et une hydratation. C’est une autre présentation de la maladie dont on parle probablement moins. Elle conduit moins les patients en réanimation mais nécessite pour nous un plus long délai d’hospitalisation.
DR MALLET : Très intéressant. Voici maintenant la question d’un médecin généraliste dans le 13e.
J’ai adressé au SAU d’un grand hôpital une jeune infirmière de 34 ans sans antécédent avec un syndrome méningé fébrile. Cette personne a été testée positive au COVID, elle a eu une ponction lombaire aux urgences dont le compte-rendu était normal. Elle a été renvoyée à la maison au bout de 12h puis inscrite sur COVIDOM, la plateforme qui surveille les patients COVID+ à domicile.
Cette femme a conservé des céphalées hyperalgiques et de la photophobie sans véritablement de fièvre pendant 4 jours. Elle est aujourd’hui tirée d’affaire mais je m’interroge sur une bradypnée et une désaturation persistante pendant cette période de céphalées, de méningite, après son passage aux urgences.
Qu’en pensez-vous ?
PR PAUL LEGENDRE : Merci pour cette observation très intéressante.
Nous voyons déjà le premier danger du COVID qui nous guette – par ailleurs assez angoissant – de passer à côté d’une autre urgence que le COVID et de ne donc pas traiter quelque chose qui aurait été curable.
Ici, le syndrome méningé fébrile doit rester avant tout associé à la méningite bactérienne. Après, nous pourrons réfléchir à d’autres étiologies.
A priori, le COVID favorise la possibilité de donner des syndromes méningés mais aussi plus largement des atteintes neurologiques à type d’encéphalites comme cela a déjà été décrit auparavant par les équipes chinoises. Une forme neuro-invasive est aussi décrite, avec ce qui est le plus connu finalement : l’anosmie. C’est une neuro-invasion des nerfs crâniens.
Il y a également des formes de méningites puisque des PCR COVID ont été réalisés dans le LCR de patients et ont révélé la présence du virus associé à une inflammation. Cette particularité du virus peut probablement mimer de véritables méningites virales.
Le tableau de ces céphalées fébriles – puisque nous savons d’après les patients que les céphalées sont très violentes – sont donc tout à fait compatibles avec le diagnostic.
Il y a ensuite des choses plus difficiles à comprendre dans cette observation.
La première est la bradypnée présentée par la patiente. C’est quand même plutôt rare et associé à des troubles métaboliques et à des atteintes de la commande de la respiration au niveau du tronc cérébral. Dans ce cas, soit nous envisageons la patiente comme grande sportive ayant de base une bradypnée associée, soit elle a des modifications de la diffusion du CO2 avec un shunt.
DR MALLET : Du fait de son atteinte respiratoire ?
PR PAUL LEGENDRE : Tout à fait. Mais ce qui serait par contre envisageable – même si c’est très expectatif – c’est une atteinte neurologique en lien avec le COVID. À moins d’avoir fait une IRM cérébrale pour vérifier s’il y avait une inflammation au niveau des centres de régulation de la respiration, il est difficile de juger de cela.
DR MALLET : En tout état de cause, il est difficile d’affirmer une bradypnée sans faire de gaz de sang.
PR PAUL LEGENDRE : Oui. En revanche, ce qui est intéressant est que la patiente a été hypoxémique. Cela est assez fréquent. Il faut savoir que des patients asymptomatiques sur le plan respiratoire – nous en avons vu plusieurs – ont des scanners pathologiques avec des images d’inflammations pulmonaires à type d’Escherichia coli.
Ces images sont très probablement sous-estimées chez des patients qui ne se plaignent pas de symptômes pulmonaires. À moins de poser son stéthoscope et d’entendre des crépitements, il est possible de passer à côté.
Cette hypoxémie existe probablement finalement parce qu’il y a une atteinte des alvéoles. Sur des séries autopsiques à Bergame il a été montré qu’il y avait des lésions de vascularites pulmonaires avec une inflammation de petits vaisseaux qui va limiter la diffusion de l’oxygène dans le sang.
Cette hypoxémie transitoire est donc possiblement liée à des mécanismes inflammatoires, avec des petites thromboses locales, qui peuvent tout à fait coller avec cette hypoxémie transitoire sans qu’elle n’ait pour autant une véritable embolie pulmonaire.
DR MALLET : Le message de ce cas clinique est donc que l’infection par le COVID-19 peut avoir des atteintes de méningés, provoquer une maladie un peu systémique. Mais peut aussi créer une inflammation généralisée conduisant à des tableaux d’hypoxémie tels que des embolies pulmonaires avec des shunts par micro-thromboses ou l’inflammation des petits vaisseaux intra-pulmonaires.
PR PAUL LEGENDRE : Nous avons l’impression que ce virus génère un orage inflammatoire dans le sang qui va donner à la fois des mécanismes de thromboses, des mécanismes d’inflammations très marquées avec de la fièvre.
Il y a souvent une aggravation de la fièvre et des symptômes respiratoires entre J8 et J12 de l’infection, comme si le système immunitaire se mettait en branle pour essayer de combattre le virus mais n’y arrivait pas.
Finalement, nous avons l’impression que plus que le virus, le système immunitaire créé lui-même le désordre au niveau pulmonaire et respiratoire. C’est pour cela que plusieurs équipes ont proposé de donner des traitements immunomodulateurs dans ces cas.
Finalement, l’évolution favorable de cette patiente a l’air de s’inscrire un peu dans l’évolution de ces patients qui nécessitent des soins plus lourds comme la réanimation.
La plupart du temps, ils ont fait une inflammation généralisée au niveau pulmonaire, systémique et ont des marqueurs inflammatoires très élevés. Nous voyons des patients qui montent à 300 voire 400 de CRP avec des taux de fibrinogène très élevés dans le sang, qui nous font penser que cette inflammation est dérégulée.
Cependant, cela arrive seulement chez des patients qui semblent, a priori, avoir des particularités de leur système immunitaire.
DR MALLET : Merci beaucoup. Heureusement que cette infirmière a repris le travail pour s’occuper des patients. Voulez-vous insister sur un dernier point pour ce cas clinique ?
PR PAUL LEGENDRE : Le COVID donne de la fièvre mais pour autant, toute fièvre ne doit pas faire oublier les autres diagnostics possibles. L’écueil que nous rencontrons aujourd’hui est finalement de tout mettre sur le dos du COVID alors que ce n’est pas forcément le cas.
DR MALLET : Merci beaucoup pour ces messages. Bon courage !
PR PAUL LEGENDRE : Merci.
À l’ère du COVID-19, nous lançons Radio Cochin, des séquences courtes et des messages clairs sur le coronavirus pour nos collègues de ville.
Je suis Docteur Vincent Mallet, médecin à Cochin, Professeur des Universités de Paris et je m’entretiens avec le Professeur Paul Legendre, Chef de clinique en Médecine Interne à Cochin.
DR MALLET : Vous êtes responsable des unités COVID et du service de médecine interne de Cochin. Pouvez-vous nous raconter comment vous avez organisé les choses et vécu cette crise sanitaire majeure ?
PR PAUL LEGENDRE : Je suis en poste dans un service de Médecine Interne où nous faisons principalement des maladies auto-immunes et des maladies d’aval d’urgences. Nous avons donc dû adapter notre activité suite à cette crise sans précédent.
Nous avons dû transformer nos secteurs d’hospitalisations en salles dédiées à la prise en charge des patients COVID. Nous avons 3 salles sur 4 qui les accueillent actuellement.
Dans le cadre de l’hôpital de semaine, nous faisions de la programmation qui a été adaptée en salle COVID.
Nos patients viennent donc principalement des urgences et sont amenés à rester dans le service pour une surveillance. L’organisation a été bien faite puisque nous avons des patients qui viennent des urgences et qui sont transférés soit dans une unité de soins continus parce qu’ils s’aggravent en réanimation, soit vers des soins de suites, des hospitalisations conventionnelles ou à domicile parce qu’ils sont stables. Et il s’agit de la majorité de nos patients heureusement.
Nous avons pour l’instant accueilli des patients de tous les âges, principalement des personnes vulnérables avec des comorbidités. La prise en charge de ces malades consiste principalement à une oxygénothérapie, des traitements d’infections et une prise en charge des comorbidités associées.
DR MALLET : Donc en général, suite à quelques jours d’hospitalisation, les gens rentrent chez eux ? Comment cela se passe ?
PR PAUL LEGENDRE : Effectivement. Nous avons plutôt un rôle de plaque tournante car l’hôpital Cochin a décidé de limiter les venues dans notre service. En effet, nous sommes la porte d’entrée vers la réanimation, or comme vous le savez, la réanimation est un secteur en forte période de tension.
Nous accueillons cependant des patients qui nécessitent des soins assez lourds : des oxygénothérapies ou des comorbidités qui nécessitent une hospitalisation. Dès que nous avons l’impression que nous pouvons baisser le besoin en oxygène des patients et améliorer leur état général, ils peuvent rentrer chez eux.
Mais cela est très variable. Certains vont rester 72h dans notre service, gardent un lit d’oxygène et seront sevrés en une semaine dans un autre service. D’autres ne nécessitent pas d’oxygène mais peuvent passer 4 ou 5 jours dans notre service parce qu’ils sont très asthéniques ou dénutris.
La majorité des patients heureusement ne nécessite pas de transfert en réanimation ni en unité de soins continus. Cette majorité va donc pouvoir regagner son domicile à l’issue de cette infection.
DR MALLET : Cela fait désormais plusieurs semaines que vous travaillez ainsi. Quels sont, selon vous, les facteurs de risque de progression vers des formes graves ? Quels sont les patients dont il faut se méfier ?
PR PAUL LEGENDRE : Les patients dont il faut se méfier ne sont pas toujours ceux auxquels nous aurions pensés auparavant.
Nous avons beaucoup de patients immunodéprimés et fragiles qui font certes des formes compliquées, mais qui ont le plus souvent une évolution assez favorable et qui ne font pas forcément une forme pulmonaire grave.
Ceux qui vont faire une forme pulmonaire sévère, hypoxémique, sont plus souvent ceux qui ont un diabète, une hypertension artérielle, un surpoids. Plutôt des hommes entre 50 et 70 ans.
Ce profil de patients est souvent le plus à risque d’une dégradation respiratoire rapide. Le surpoids est donc un facteur de risque, l’obésité également.
DR MALLET : Le surpoids avec un IMC supérieur à 25 ou plutôt à 30 ?
PR PAUL LEGENDRE : A priori le surpoids d’une manière générale, donc plus de 25. L’obésité a l’air d’être un facteur de risque pour réaliser des syndromes de détresses respiratoires aiguës qui vont nécessiter une intubation puisque les patients ont a priori plus de difficulté à ventiler les bases des poumons du fait de l’abdomen coincé.
Nous avons également un profil de patients qui font des formes très asthéniques avec peu de symptômes respiratoires mais en revanche une perte de poids importante, des troubles de l’alimentation, des diarrhées. Il s’agit plutôt des personnes âgées. Cela se résout avec l’apport de nutriments intraveineux et une hydratation. C’est une autre présentation de la maladie dont on parle probablement moins. Elle conduit moins les patients en réanimation mais nécessite pour nous un plus long délai d’hospitalisation.
DR MALLET : Très intéressant. Voici maintenant la question d’un médecin généraliste dans le 13e.
J’ai adressé au SAU d’un grand hôpital une jeune infirmière de 34 ans sans antécédent avec un syndrome méningé fébrile. Cette personne a été testée positive au COVID, elle a eu une ponction lombaire aux urgences dont le compte-rendu était normal. Elle a été renvoyée à la maison au bout de 12h puis inscrite sur COVIDOM, la plateforme qui surveille les patients COVID+ à domicile.
Cette femme a conservé des céphalées hyperalgiques et de la photophobie sans véritablement de fièvre pendant 4 jours. Elle est aujourd’hui tirée d’affaire mais je m’interroge sur une bradypnée et une désaturation persistante pendant cette période de céphalées, de méningite, après son passage aux urgences.
Qu’en pensez-vous ?
PR PAUL LEGENDRE : Merci pour cette observation très intéressante.
Nous voyons déjà le premier danger du COVID qui nous guette – par ailleurs assez angoissant – de passer à côté d’une autre urgence que le COVID et de ne donc pas traiter quelque chose qui aurait été curable.
Ici, le syndrome méningé fébrile doit rester avant tout associé à la méningite bactérienne. Après, nous pourrons réfléchir à d’autres étiologies.
A priori, le COVID favorise la possibilité de donner des syndromes méningés mais aussi plus largement des atteintes neurologiques à type d’encéphalites comme cela a déjà été décrit auparavant par les équipes chinoises. Une forme neuro-invasive est aussi décrite, avec ce qui est le plus connu finalement : l’anosmie. C’est une neuro-invasion des nerfs crâniens.
Il y a également des formes de méningites puisque des PCR COVID ont été réalisés dans le LCR de patients et ont révélé la présence du virus associé à une inflammation. Cette particularité du virus peut probablement mimer de véritables méningites virales.
Le tableau de ces céphalées fébriles – puisque nous savons d’après les patients que les céphalées sont très violentes – sont donc tout à fait compatibles avec le diagnostic.
Il y a ensuite des choses plus difficiles à comprendre dans cette observation.
La première est la bradypnée présentée par la patiente. C’est quand même plutôt rare et associé à des troubles métaboliques et à des atteintes de la commande de la respiration au niveau du tronc cérébral. Dans ce cas, soit nous envisageons la patiente comme grande sportive ayant de base une bradypnée associée, soit elle a des modifications de la diffusion du CO2 avec un shunt.
DR MALLET : Du fait de son atteinte respiratoire ?
PR PAUL LEGENDRE : Tout à fait. Mais ce qui serait par contre envisageable – même si c’est très expectatif – c’est une atteinte neurologique en lien avec le COVID. À moins d’avoir fait une IRM cérébrale pour vérifier s’il y avait une inflammation au niveau des centres de régulation de la respiration, il est difficile de juger de cela.
DR MALLET : En tout état de cause, il est difficile d’affirmer une bradypnée sans faire de gaz de sang.
PR PAUL LEGENDRE : Oui. En revanche, ce qui est intéressant est que la patiente a été hypoxémique. Cela est assez fréquent. Il faut savoir que des patients asymptomatiques sur le plan respiratoire – nous en avons vu plusieurs – ont des scanners pathologiques avec des images d’inflammations pulmonaires à type d’Escherichia coli.
Ces images sont très probablement sous-estimées chez des patients qui ne se plaignent pas de symptômes pulmonaires. À moins de poser son stéthoscope et d’entendre des crépitements, il est possible de passer à côté.
Cette hypoxémie existe probablement finalement parce qu’il y a une atteinte des alvéoles. Sur des séries autopsiques à Bergame il a été montré qu’il y avait des lésions de vascularites pulmonaires avec une inflammation de petits vaisseaux qui va limiter la diffusion de l’oxygène dans le sang.
Cette hypoxémie transitoire est donc possiblement liée à des mécanismes inflammatoires, avec des petites thromboses locales, qui peuvent tout à fait coller avec cette hypoxémie transitoire sans qu’elle n’ait pour autant une véritable embolie pulmonaire.
DR MALLET : Le message de ce cas clinique est donc que l’infection par le COVID-19 peut avoir des atteintes de méningés, provoquer une maladie un peu systémique. Mais peut aussi créer une inflammation généralisée conduisant à des tableaux d’hypoxémie tels que des embolies pulmonaires avec des shunts par micro-thromboses ou l’inflammation des petits vaisseaux intra-pulmonaires.
PR PAUL LEGENDRE : Nous avons l’impression que ce virus génère un orage inflammatoire dans le sang qui va donner à la fois des mécanismes de thromboses, des mécanismes d’inflammations très marquées avec de la fièvre.
Il y a souvent une aggravation de la fièvre et des symptômes respiratoires entre J8 et J12 de l’infection, comme si le système immunitaire se mettait en branle pour essayer de combattre le virus mais n’y arrivait pas.
Finalement, nous avons l’impression que plus que le virus, le système immunitaire créé lui-même le désordre au niveau pulmonaire et respiratoire. C’est pour cela que plusieurs équipes ont proposé de donner des traitements immunomodulateurs dans ces cas.
Finalement, l’évolution favorable de cette patiente a l’air de s’inscrire un peu dans l’évolution de ces patients qui nécessitent des soins plus lourds comme la réanimation.
La plupart du temps, ils ont fait une inflammation généralisée au niveau pulmonaire, systémique et ont des marqueurs inflammatoires très élevés. Nous voyons des patients qui montent à 300 voire 400 de CRP avec des taux de fibrinogène très élevés dans le sang, qui nous font penser que cette inflammation est dérégulée.
Cependant, cela arrive seulement chez des patients qui semblent, a priori, avoir des particularités de leur système immunitaire.
DR MALLET : Merci beaucoup. Heureusement que cette infirmière a repris le travail pour s’occuper des patients. Voulez-vous insister sur un dernier point pour ce cas clinique ?
PR PAUL LEGENDRE : Le COVID donne de la fièvre mais pour autant, toute fièvre ne doit pas faire oublier les autres diagnostics possibles. L’écueil que nous rencontrons aujourd’hui est finalement de tout mettre sur le dos du COVID alors que ce n’est pas forcément le cas.
DR MALLET : Merci beaucoup pour ces messages. Bon courage !
PR PAUL LEGENDRE : Merci.
Radio Cochin est une série de cas cliniques audio créés pour les soignants de ville, par des experts de toutes spécialités médicales, pour renforcer la collaboration ville-hôpital face au coronavirus.